Une dysfonction Ostéopathique est un réflexe de défense localisé qui dure dans le temps de manière anormale (voir détail ici).
Elle intéresse toujours différents éléments articulaire, ligamentaire, musculaire, aponévrotique (ou fascia), vasculaire et neurologique. C’es un complexe qui n’est jamais seulement articulaire ou musculaire.
Différentes techniques de correction (on parle aussi de réharmonisation, de normalisation ou de réajustement) sont à la disposition de l’ostéopathe.
Toutes les techniques Ostéopathiques ont pour principe d’informer le corps de la situation pour qu’il arrête de se défendre inutilement.
Toutes les techniques ostéopathiques sont des techniques réflexes, même les manipulations : l’information donnée au corps par la main de l’ostéopathe provoque un relâchement de toutes les structures qui maintiennent la restriction de mobilité.
Sinon, comment faire comprendre au corps qu’il doit arrêter de se défendre si on l’agresse ?
En résumé, en Ostéopathie :
Il n’existe aucune technique plus « douce » qu’une autre.
Il n’existe pas de technique « brutale » ou « agressive ».
Il n’existe pas de technique « de force ».
Le choix dépend uniquement du type de structure qu’il faut informer et des besoins de votre corps (voir « Ostéopathie, comment ça marche : Généralités« ).
Insister sur l’emploi exclusif de « techniques douces » relève au mieux d’un effet de mode ou d’une démarche commerciale, au pire d’un manque de compréhension d’une dysfonction…
Pour être efficace, un ostéopathe se doit de connaître et de maîtriser les différentes techniques :
Les Techniques Structurelles
Il s’agit des techniques les plus médiatisées, mais finalement les plus mal connues. Dites Technique à Haute Vélocité et Basse Amplitude (H.V.B.A.), on les appelle dans le langage courant « Manipulations Vertébrales ». Ce sont les plus anciennes techniques de médecine manuelle connues. Elles figurent parmi les plus efficaces.
Elles sont souvent accompagnées d’un bruit articulaire et d’une sensation de mouvement. Pour beaucoup de personnes (dont certains praticiens malheureusement), elles permettent de « replacer » une vertèbre. En réalité, il s’agit de techniques réflexes et non de techniques de force. De plus, lorsque celle-ci est correctement réalisée, les pressions induites par la technique sont insuffisantes pour créer des blessures (Lisi, et al., 2006).
Il ne s’agit pas de « replacer » une vertèbre mais de lever un réflexe de défense !
Bien réalisées, elles sont parfaitement indolores.
Si malgré tout vous en avez peur, dites-le ! Votre ostéopathe utilisera d’autres méthodes, ce n’est pas un problème…
Le Principe :
Il s’agit de repositionner localement le corps dans les trois plans de l’espace très précisément à l’endroit où le réflexe de défense articulaire c’est déclenché. Toutes les structures impliquées sont alors dans le même état de tension (qui est toujours situé dans les limites physiologiques du mouvement). à ce moment, le praticien donne le plus rapidement possible la plus petite impulsion nécessaire pour déclencher un réflexe. Il arrive parfois que votre respiration suffise à déclencher le réflexe. Ce réflexe va induire le relâchement instantané de toutes les structures impliquées dans le maintien de la dysfonction ostéopathique. C’est pourquoi elles sont appelées techniques de Haute Vélocité – Basse Amplitude (HVBA) en Ostéopathie.
Le Bruit articulaire :
Au moment du relâchement, les surfaces articulaires fortement pressées l’une contre l’autre retrouvent leur écartement normal. Ce retour est accompagné par la production d’une petite bulle de vide qui implose tout de suite (Cramer, et al., 2002 ; Cramer, et al., 2012). C’est comme claquer votre langue dans la bouche. Il ne s’agit donc pas d’un craquement articulaire ! Le bruit dépend de la vitesse du retour à la normale, il n’est pas systématique bien que très fréquent.
La Sensation de mouvement :
Lors du relâchement, les petits récepteurs sensitifs que comportent les structures impliquées dans le maintien de la dysfonction envoient tous en même temps des informations au cerveau. Devant cette grande quantité d’information, celui-ci n’a pas d’autre choix que d’imaginer un mouvement qui va dans tous les sens en même temps. En réalité, il ne se produit aucun mouvement, c’est une illusion.
Il existe différentes méthodes de techniques HVBA, elles utilisent toutes les mêmes principes.
Précision extrême, haute vélocité… Trop souvent mal considérées, les techniques HVBA demandent au contraire un très grand savoir-faire…
Leur principal inconvénient est leur mauvaise réputation et la peur qu’elles provoquent. Comme il s’agit de lever un réflexe de défense, et que la peur va augmenter celui-ci, la peur est une contre-indication (relative) à l’emploi de ces techniques.
Par précaution, elles sont déconseillées chez les nourrissons, chez les personnes présentant une ostéoporose ou toute personne présentant un trouble de l’ossification. Toute affection modifiant le réflexe à la base de la technique est une contre-indication à leur utilisation. D’autres limitations existent, votre ostéopathe les connaît.
Les Techniques par Énergie Musculaire
Il s’agit d’un groupe de technique introduites en 1958 par un ostéopathe américain, Fred L. Mitchell Sr. à l’origine destinées aux articulations du bassin, elles ont étés par la suite étendues au reste du corps. Elles sont très largement utilisées en Ostéopathie.
Le Principe :
Il s’agit d’utiliser des contractions volontaires contre une résistance précisément dosée [de l’ordre du gramme ou de la centaine de grammes] pour « desserrer » une articulation positionnée spécifiquement [juste avant le réflexe de défense] afin de permettre une mobilisation passive de l’articulation lors de la phase de relaxation (Mitchell, 1958).
En clair, le corps est positionné dans les trois plans de l’espace juste avant la dysfonction, puis le praticien utilise une contraction musculaire à la place d’une impulsion pour rétablir la mobilité physiologique. Chaque contraction dure environ 10 s suivie d’un temps de relâchement équivalent. Il est exécuté 3 séries de 3 contractions.
L’erreur la plus fréquente est d’utiliser trop de résistance en ne tenant pas compte des caractéristiques physiologiques des muscles concernés (répartition des fibres musculaires posturales ou dynamiques à l’intérieur du muscle). Malgré les apparences, il ne s’agit pas d’une simple technique de « contracter-relâcher ».
Malgré son aspect inoffensif, il s’agit d’une technique structurelle au même titre que l’H.V.B.A. et en possède les même indications et contre-indications. Fred Mitchell Jr va même jusqu’à dire dans la préface de son livre (Mitchell & Mitchell, 1995) que la maîtrise de ces techniques est une première étape vers la maîtrise des techniques H.V.B.A.
Différents types de contractions peuvent être utilisés en fonction du but recherché, et de l’état inflammatoire, œdémateux ou fibrosé des tissus (Mitchell & Mitchell, 1995).
Leurs principaux inconvénients sont de nécessiter votre participation active et d’induire une micro-mobilité articulaire.
Les Techniques Fonctionnelles
Il s’agit d’un ensemble de différentes méthodes qui ne vont pas rechercher à positionner le corps au niveau du réflexe de défense, mais au contraire à le placer dans une position d’équilibre, c’est-à-dire là où se trouve le nouveau point de référence du mouvement.
Le principe est d’informer le corps sur la position anormale du point de référence et le laisser réagir jusqu’à ce que le point de référence retrouve sa position physiologique.
Ce point d’équilibre n’est pas forcement confortable. Il est assez courant de ressentir une tension qui augmente progressivement, parfois jusqu’à être douloureuse, avant de disparaître complétement d’un seul coup et laisser la place à une sensation de confort.
Parmi les plus utilisées on retrouve les techniques dites de « Strain and Counterstrain » du Dr Jones et celle dite d’ « équilibration réciproque » du Dr W.G. Sutherland.
C’est également dans cette catégorie que l’on retrouve les techniques dites «fasciales», c’est-à-dire toutes les techniques qui s’intéressent au tissu de soutien (on parle aussi de tissu conjonctif ou de tissu aponévrotique) du corps. Il en existe de très nombreuses variantes impossibles à citer ici. Ces techniques utilisent la notion de « point neutre ». C’est une position dans laquelle le fascia ne présente plus sa très faible mobilité spontanée. Le praticien maintient cette position le temps nécessaire à la réapparition d’une mobilité (parfois jusqu’à 1 min). Pendant le temps d’arrêt, le tissu fascial se sera relâché et aura récupéré sa mobilité.
Il est possible de ressentir une sensation de chaleur sous la main du praticien qui diffuse progressivement, ou bien une sensation de vague liquide qui circule dans le corps. Ceci correspond simplement à une meilleure circulation du sang (chaud) au travers de tous petits vaisseaux, les capillaires, le corps étant très sensible aux variations de température.
Il est aussi assez fréquent de voir son corps se mettre à trembler ou de sentir des émotions revenir à la surface. Ce n’est pas grave, laissez faire, cela témoigne de l’efficacité de la technique et du relâchement des structures.
Le relâchement somato-émotionnel est une technique à part entière de haute complexité. Son objectif est de vous permettre d’évacuer les tensions émotionnelles liées à des chocs affectifs, un passé douloureux, etc. Très intime, elle demande à vous être présentée, et réclame votre accord pour être effectuée.
Pour être correctement réalisées et réellement efficaces, ces techniques demandent une très grande concentration de la part du praticien. Étant un être humain lui aussi, ce n’est pas la mobilité de ses propres fasciae (pluriel de fascia) qu’il doit projeter sur vous mais ressentir uniquement les vôtres. Il doit s’effacer jusqu’à devenir un miroir dans lequel vous vous reflétez.
Ne soyez donc pas surpris de voir certains praticiens les yeux fermés, la respiration lourde et silencieux…. Il ne dort pas ! Il est au contraire entièrement concentré sur le contact de sa main sur vous et les perceptions qu’il reçoit.
Les principaux inconvénients de ces techniques se sont… les soucis de l’ostéopathe qui ne lui permettront pas d’atteindre la concentration voulue. L’expérience permet de raccourcir le temps nécessaire à la concentration, permet de ressentir des mobilités de plus en plus fines, mais ne diminue pas le degré de concentration à avoir. L’efficacité de ces techniques est fortement praticien-dépendant.
Les Techniques Spécifiques
Il s’agit de méthodes spécifiques à un domaine d’application (sphère crânio-sacrée, sphère viscérale) ou à une approche (techniques tissulaires).
- Sphère crânio-sacrée : On entend par sphère crânio-sacrée l’ensemble de la face, du crâne, des enveloppes du cerveau et de la moelle spinale (les méninges) jusqu’à leurs attaches terminales au niveau du coccyx (petit os situé au dessus de l’anus), et du liquide qu’elles contiennent, le liquide cérébro-spinal. Cette approche a été développée vers 1954 par le Dr W.G. Sutherland. De très nombreux ouvrages techniques ont été publiés sur le sujet. Il est impossible de les résumer ici. Pour l’essentiel, elles utilisent les mêmes principes que les techniques fasciales et réclament le même degré de concentration de la part du praticien. Les concepts qui sont à l’origine de cette approche sont actuellement en cours de réexamen au sein de la profession en raison des avancées scientifiques récentes sans que cela ait d’incidence sur la pratique et les résultats.
- Sphère viscérale : Les techniques utilisées s’adresse au contenu du thorax, de l’abdomen et du bassin. C’est un champ d’application récent, développé dans les années 80 par des ostéopathes français. On retrouve une école de pensée plutôt de type structurel (J. Weischenck), une autre plutôt fasciale (J.P. Barral & P. Mercier ; G. Finet & C. Williame), le choix de la technique revenant finalement à vos besoins particuliers à un moment donné.
- Approche Tissulaire : C’est un ensemble de méthodes où le praticien cherche à rééquilibrer le corps dans sa globalité plutôt qu’en corrigeant une série de dysfonctions locales. Elles sont très en vogue actuellement, et présentées comme nouvelles bien que leur concept ait été posé depuis longtemps par A.T. Still. Elles demandent de très bonnes connaissances de l’anatomie et du fonctionnement du corps humain, de l’entraînement, de la rigueur et de l’expérience pour être maîtrisées. Elles ont l’avantage d’avoir très peu de contre-indications, et l’inconvénient de devoir parfois être répétées plusieurs fois avant de produire un résultat clinique notable par vous.
Les Techniques
Non – Spécifiques
Il s’agit d’un ensemble de techniques ou de manœuvres que l’on retrouve dans différentes approches manuelles de la santé : mobilisation, pétrissage, modelage, crochetage, etc. ou bien de méthodes réflexes (Chapman, Knapp, Massage réflexe ou BGM, etc.).
Elles n’ont alors d’ostéopathique que la philosophie de leur mise en œuvre et le but recherché. Elles n’ont de simplistes que leur apparence. Leur emploi se résume en une phrase : La juste pression, au bon endroit et au bon moment.
Correctement utilisées par une main bien entraînée, leur emploi peut s’avérer d’une efficacité redoutable. Regroupées sous le terme de T.O.G. (pour Traitement Ostéopathique Général), elles constituent le socle des techniques utilisées par les pionniers de l’Ostéopathie, ceux qui ont donné ses lettres de noblesse à la discipline.
Références :
Cramer, G. et al., 2002. The effects of side-posture positioning and spinal adjusting on the lumbar Z joints: a randomized controlled trial with sixty-four subjects. Spine, 15 Nov, 27(22):2459-66.
Cramer, G. et al., 2012. Quantification of cavitation and gapping of lumbar zygapophyseal joints during spinal manipulative therapy.. J Manipulative Physiol Ther., oct, 35(8):614-21.
Lisi, A. et al., 2006. Measurement of in vivo lumbar intervertebral disc pressure during spinal manipulation: a feasibility study. J Appl Biomech. , Aug, 22(3):234-9.
Mitchell, FL Sr, 1958. Structural Pelvic Function, Academy of Applied Osteopathy Yerabook, 71-90
Mitchell, FL, Jr & Mitchell, KG, 1995. The Muscle Energy Manual, Vol. 1, MET Press, East Lansing, Michigan.